Pour ses supporteurs, le Liverpool Football Club, sacré champion d’Angleterre en juin 2020, est l’emblème d’une ville fière de sa singularité, à la fois populaire, ouverte sur le monde et défiante envers le reste du pays. Arrivés aux manettes il y a dix ans, les propriétaires américainsdu club cultivent soigneusement cette image, qui séduit désormais au-delà des frontières de la cité portuaire.
C’est un moment de communion célèbre dans le monde entier. Avant chaque match à domicile du Liverpool Football Club (LFC), les supporteurs, dont ceux du kop, tribune où se retrouvent les plus fervents, entonnent le chant You’ll Never Walk Alone (« Vous ne marcherez jamais seuls »), symbole d’un dévouement total à une équipe qui figure parmi les géants du Royaume-Uni et de l’Europe.
À l’heure de l’argent-roi et de la mondialisation du ballon rond, le LFC, détenu par le conglomérat américain Fenway Sports Group (FSG), prétend incarner la singularité d’une ville par rapport au reste de l’Angleterre. Il revendique également la synthèse entre objectifs financiers et passion des fans, grâce à l’adhésion à des principes « socialistes ».
Champion d’Europe en 2019 et vainqueur en juin 2020, pour la première fois depuis trente ans, du championnat d’Angleterre, le club ne cesse de faire référence à Bill Shankly, son illustre ancien manageur (entre 1959 et 1974), statufié à l’entrée du stade d’Anfield.
Connu pour sa fameuse déclaration « Le football, ce n’est pas une question de vie ou de mort. C’est bien plus important que cela », Shankly avait exposé sa vision à ses joueurs : « Que chacun travaille pour atteindre le même objectif et que chacun partage le succès si celui-ci est atteint : tel est le socialisme auquel je crois. Je vois le football et la vie ainsi. »
Près de cinquante ans après, le président-directeur général (PDG) du club, M. Peter Moore, livrait, dans les colonnes du quotidien espagnol El País, le même message : « Le succès de Liverpool se fonde sur le socialisme. » Sincérité ou opportunisme de la part du représentant de FSG, troisième entreprise de sport-business du monde selon Forbes, conglomérat qui réalise 6,6 milliards de dollars de chiffre d’affaires (dont 2,2 milliards pour le seul LFC) ?
La même question se pose concernant le manageur, M. Jürgen Klopp, dont le salaire annuel atteint 11,3 millions d’euros et qui affirme son adhésion aux valeurs « (…)
Suite du reportage paru dans “Le Monde Diplomatique”, novembre 2020, à lire ICI.